Qui n’a pas rêvé un jour de se créer un petit coin de nature chez lui ? L’aquarium, peu gourmand, en place est souvent la solution choisie par les citadins en manque de verdure. Mais le constat est souvent le même : « un aquarium c’est trop d’entretiens, j’abandonne ! » Et pourtant rien n’est plus faux si on respecte deux trois règles simples inspirées de Dame Nature ! Alors comment profiter d’un aquarium sans avoir autre chose à faire qu’à lutter contre l’évaporation naturelle de l’eau ? L’aquariophilie naturelle !
Une lutte contre les dogmes : l’aquariophilie naturelle
Ce type d’aquariophilie consiste à faire un aquarium le plus simple possible dans lequel on laisse la nature faire son œuvre : un bac de l’eau, de la lumière, un substrat et le plus important des plantes en grand nombre ! En effet, c’est elles qui vont maintenir l’écosystème sain et équilibré et ainsi limités les interventions humaines à la taille des plantes, la compensation de l’évaporation, et deux ou trois changements d’eau par an, c’est tout. Pas de filtration biologique surpuissante, pas d’éclairage puissant non plus, pas d’injection de CO2, pas de changements d’eau hebdomadaire. Bien sûr, suivant les cas tu peux envisager une petite pompe pour le brassage de l’eau, ou un chauffage réglé à 21/23° l’hiver ou un petit changement d’eau en cas de pollution peut être envisagé… En aquariophilie naturelle pas de dogme mais une approche expérimentale !

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La première et plus sacro-sainte règle de l’aquariophile est de ne jamais écouter les vendeurs d’animalerie qui ne cherche qu’à vendre le maximum de produits ! La seconde devrait être de s’inspirer tout simplement de ce que fait Dame Nature ! Les débutant comprennent rapidement la première. En revanche, ce n’est que trop rarement le cas pour la seconde… En effet, contrairement aux idées reçues, la filtration mécanique n’est pas indispensable mais, au contraire, elle est contre-productive et source principale de l’entretien aliénant de l’aquarium.
Le cycle de l’azote
La première révolution mentale, lorsqu’on désire se lancer dans l’aquariophilie naturelle, consiste à faire abstraction du sacro-saint dogme propagé sur tous les forums d’aquariophilie conventionnels : Le cycle de l’azote ! Les déchets (urine, excréments, débris végétaux, excès de nourriture, poissons morts…) sont en permanence libérés dans l’aquarium: ces produits azotés sont rapidement dégradés et transformés en ammoniaque (NH3-), extrêmement toxique pour nos petits protégés. Le rôle de la filtration mécanique, appelé cycle de l’azote, est de transformer l’ammoniaque en nitrates, nettement moins toxiques à faible dose.

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Cette filtration biologique passe par l’action de milliards de bactéries qui vont l’utiliser comme source d’énergie, tout d’abords, des bactéries, appelées Nitrosomonas vont se charger de transformer l’ammoniaque (NH3-) très toxique en nitrites (NO2-). Les nitrites, elles aussi toxiques, vont être transformées en nitrate (NO3-) par les Nitrobacter et Nitrospira qui vont ainsi achever ce fameux cycle de l’azote. Mais si les nitrates sont moins toxiques, à forte dose, le résultat est le même, mort de nos chers compagnons ! C’est pour cette raison qu’il est indispensable de changer chaque semaine 10-20 % de l’eau du bac ! Et ça c’est vraiment aliénant alors comment s’en passer ?
Les plantes : le filtre en aquariophilie naturelle
L’aquariophilie s’inspirant de la nature n’utilise que les plantes pour débarrasser l’aquarium des composés azotés. Comme le démontre Diana Walstad, ancienne biologiste cellulaire à l’Institut National des Sciences de la Santé de l’Environnement, dans « L’écologie de l’aquarium planté », les plantes aquatiques, contrairement aux plantes terrestres, assimilent beaucoup plus facilement l’ammoniaque que les nitrates. Lisons : « Les plantes, les algues, et tous les organismes à travers la photosynthèse utilisent l’azote à partir de l’ammoniaque – non les nitrates – pour produire leurs protéines. Quand la plante prend des nitrates, ceux-ci doivent être convertis en ammonium dans un processus nécessitant de l’énergie appelée «la réduction des nitrates » … Alors que le filtre mécanique convertit l’ammonium en nitrate…

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T’as saisi le paradoxe ! En aquariophilie naturelle, c’est tout l’aquarium qui devient un filtre. Les bactéries nitrifiantes vont naturellement coloniser les différents supports comme les roches ou le bois et même les feuilles des plantes présentes dans l’aquarium. Mais, contrairement à la filtration mécanique qui va les suralimenter et donc favoriser leurs croissances, en aquariophilie naturelle, ces dernières vont rentrer en compétition avec les plantes pour la consommation de l’ammonium et ainsi s’autoréguler. Plus il y aura de plantes, moins il y aura de bactéries nitrifiantes, donc moins de génération de nitrates, et donc moins de changement d’eau nécessaire ! La nature n’est-elle pas bien faite?
La théorie, c’est bien, mais en pratique ça donne quoi ?
La première question à se poser lorsqu’on se lance dans l’aquariophilie est la taille du bac. Les forum spécialisé conseil souvent de choisir d’abord sa population. Personnellement, je trouve légitime que quelqu’un qui vit dans un studio ne souhaite pas avoir un 1000L.
Mais garde à l’esprit que plus l’aquarium sera petit, plus le choix des poissons sera restreint et surtout que, plus un bac est grand, plus celui-ci aura de l’inertie. En effet, la suralimentation, par exemple, aura moins d’impact sur l’équilibre d’un bac de 300L que dans un de 30L. Par ailleurs, contrairement aux idées reçues (foutu dogme !), la hauteur de l’aquarium a une importance. En effet celle-ci permet d’augmenter le volume a surface constante, de réellement différencier les milieux de vie (fond, milieu, surface), permettant à chaque espèce de trouver sa place dans l’aquarium et, enfin, de permettre une meilleure convection thermique, créant ainsi un léger courant. Un aquarium ouvert est intéressant, car il permet l’utilisation de plantes en trempette, on y reviendra, et permet aussi d’attirer les insectes dont les poissons se délecteront !

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Concernant son équipement seul l’éclairage et un substrat est réellement indispensable. Un éclairage modéré (-1w pour 2 ou 3 litres), à raison de 8 à 10 heures par jour, est généralement suffisant. Concernant le substrat, le sujet fait souvent débat, sol nutritif ou pas. Personnellement, je préfère me contenter d’une couche de billes d’argile et sur laquelle repose une épaisseur minimum de 5cm du sable de Loire. Car les plantes réellement aquatiques préfèrent absorber les éléments indispensables par leur feuillage et qu’un sol nutritif peut être source de pollution,. Mais libre à toi, suivant les plantes choisies, d’ajouter entre la couche de sable et celle d’argile un sol nutritif. Enfin un léger brassage peut être nécessaire, car il permet de mieux répartir les nutriments indispensables aux plantes. Un tout petit filtre intérieur débarrassé de ses masses filtrantes suffira.
Un bac avec de l’eau c’est bien mais avec de la vie c’est mieux
Comme je te l’ai dit précédent en aquariophilie naturelle il est indispensable d’avoir un maximum de plantes. Les Cératophyllum, Elodée, Najas, et autre Vallisnéries, par exemple, sont des plantes 100 % aquatique. Elles sont donc peu exigeantes et très efficaces en termes d’épuration et d’oxygénation de l’eau. Les plantes flottantes, comme les Pistia ou la Salvinia, sont également indispensables. La lentille d’eau par exemple est même capable d’absorber les nitrites. Tu peux aussi compléter ta plantation par des plantes amphibie. Ce sont des plantes dont les racines sont dans l’eau mais dont le feuillage est à l’air libre. Le Pothos, par exemple, est réputé pour ses capacités épuratrices. Comment le planter ? Rien de plus simple! Tu prends une demie noix de coco remplie de billes d’argile. Tu la perce de plusieurs trous. Puis tu l’as suspend au-dessus de l’aquarium, de manière à ce que les billes d’argile trempent dans l’eau !

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Te voilà avec un super jardin aquatique, il est temps de le peupler ! Essentiels dans un aquarium naturel les alguivores et autre détritivores doivent être introduits en premiers. Ces êtres minuscules, outre le spectacle qu’ils nous procurent, contribuent également à l’équilibre biologique d’un aquarium en dégradant les déchets organiques. Le triptyque gagnant que j’utilise dans tous mes aquariums est : crevettes Neocaridina , des escargots et enfin des écrevisses CPO.
Tu peux aussi ajouter tout un tas d’espèce que tu peux pêcher dans des mares non polluées comme des daphnies, des ostracodes, des aselles, des gammares ou encore des cyclops. Pas de filtre, pas de pic de nitrite, tu peux donc introduire rapidement ces invertébrées. Personnellement je les introduis une semaine après la mise en eau.

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Concernant le choix des poissons, je vais éviter de te présenter les centaines d’espèces commercialisées, mais garde à l’esprit qu’il ne faut jamais surpeupler un bac. C’est à toi de voir, mais personnellement j’essaye de trouver des espèces provenant d’un même écosystème et suffisamment petit pour ne pas s’attaquer aux crevettes adultes. Tu peux par exemple composer une une population originale avec un harem de Dario Dario ainsi qu’une dizaine de micro danio. Le tout dans un petit 90-120L. Avant d’introduire les poissons, prends le temps de laisser la micro faune se reproduire tout en observant ton aquarium, afin de détecter des signes de déséquilibre. En aquariophilie, patience et observation sont souvent gages de succès !
Expérimenter c’est avant tout observer !
Si l’aquariophilie naturelle ne demande que peu d’intervention humaine, elle demande toutefois d’observer régulièrement et attentivement son aquarium. Un comportement anormal est toujours le signe d’un problème plus profond. Il y a, bien sur tout un tas de tests pour vérifier les différents paramètres physico-chimiques. Mais je e trouve qu’une observation attentive, notamment des algues présentes en aquarium, permet de détecter les problèmes plus simplement. Par exemple, parmi les plus courantes au démarrage d’aquarium, les algues brunes investissent principalement les surfaces inertes comme les éléments de décor. Elles sont de couleur brune et se répartissent en une fine couche en surface du support. Elles sont le signe d’une détérioration des paramètres ou de la qualité de l’éclairage et disparaissent généralement au moment du retour à l’équilibre.
Autre exemple, les algues bleues. Ce ne sont pas des algues à proprement parlé mais de micro-organismes unicellulaires. Appelés cyanobactéries, elles sont caractérisés par le développement d’une couche visqueuse verte/bleue sur toutes les surfaces. C’est une algue très proliférative qui n’est mangée ni par les poissons ni les escargots alguivores du fait de la présence de toxines. Ce type d’algues se développe lors d’un déséquilibre de la balance nitrates/phosphates. Elle est souvent annonciatrice d’un sol en putréfaction, notamment dû à un excès d’engrais. Les algues pinceaux sont vert foncé ou noires. Elles apprécient les zones à fort courant et prolifèrent sur le décor et sur les feuilles des plantes à croissance lente. Elles n’apparaissent que dans des aquariums où les taux de nitrates sont trop hauts.
Sans vouloir me répéter en aquariophilie, et encore plus en aquariophilie naturelle, il est important de prendre son temps. Ne cherche pas à avoir le plus rapidement possible ta population définitive. Au contraire, prends le temps de laisser les différentes espèces s’acclimater et se reproduire avant d’en introduire de nouvelles. Ne cherche pas non plus à multiplier les espèces et privilégie plutôt le nombre de poissons par espèce. Tes poissons auront un comportement plus naturel et ton aquarium n’en sera que plus beau. Un grand banc de néon sera toujours plus que deux petits bancs. Patience est mère de vertus !
Au fait, j’ai déniché pour toi un super blog dédié à la nature qui a consacré un article très complet sur le sujet… C’est par ici !